Au premier abord, l’Académie Écosystèmes semble être une activité de réseautage. Cependant, il s’agit d’un espace autogéré qui rassemble différents besoins en matière d’apprentissage et favorise l’échange de connaissances entre les participants. La barre a été placée très haut pour cette deuxième édition. La première édition a eu lieu à Amman, en Jordanie, l’année dernière. Cet essai réussi a incité l’équipe d’All Around Culture à reproduire l’expérience et à la perfectionner. Dirigé par MitOst , l’événement de cette année a réuni des bénéficiaires des quatre composantes du programme dans le cadre magnifique, intime et harmonieux de Dayra Camp à Nuweiba, en Égypte. Accompagnés de l’équipe plus large du programme et d’invités externes, les membres du groupe se sont réunis dans un cadre unique et audacieux, en tant qu’individus qui représentent divers postes au sein de la sphère culturelle de la région Mena.

La réunion de trois jours a été animée par Olha Kotska et Silvana Naguib de MitOst à la manière d’un forum ouvert avec plus de 32 sessions durant lesquelles les participants ont pu partager leur expertise et leur pratique artistique en utilisant divers supports de leur choix. Après de longues journées d’échanges, le ciel nocturne clair, le vent léger de la mer Rouge et le sable sous les pieds étaient un terrain attrayant pour des lectures théâtrales, des projections de films et des discussions continues autour d’un feu de joie sur des sujets qui revêtent une certaine importance, y compris les questions sur la manière dont l’écosystème culturel de la région peut devenir indépendant, ainsi que les différentes façons de partager des connaissances et de découvrir les pratiques de chacun.

Le premier jour débute comme toujours lors de tels rassemblements, par des activités physiques et des exercices pour briser la glace. Cela a favorisé un accueil plus convivial pour tous les participants venus de différentes régions à travers le monde. Avec de nombreux nouveaux noms et visages à retenir, les participants se sont divisés en petits groupes pour se mettre d’accord sur les principes clés de leur participation au cours des trois prochains jours. Une fois le consentement obtenu, les animateurs de l’atelier ont présenté un programme détaillé, haut en couleur et, surtout, autodirigé, en adoptant la technique du forum ouvert. Les participants étaient invités à le parcourir intuitivement et à suivre ses principes, tout en gardant le modèle réflexif du « Quoi ? Et alors ? Et maintenant que faire ? » à l’esprit.

Ce jour-là, les participants se sont répartis en petits groupes pour approfondir les sujets de rédaction de rapports, d’anthropologie, de conception graphique, de collaboration, d’archivage numérique, de gestion financière et de politiques culturelles. Beaucoup de conseils pratiques ont été partagés et un esprit d’engagement artistique et de mise en valeur régnait dans la salle. Mohammed El Tannir de Culture Resource a partagé son expérience avec les rapports, tout en invitant les autres à faire part de leurs réflexions et de leurs idées. Les participants ont identifié des problèmes clés, notamment la complexité des rapports, le caractère chronophage de l’activité, le fait que le temps passé à produire des rapports ne soit pas rémunéré et le manque d’échange d’informations entre les donateurs. Plus tard dans la journée, la consultante financière Yasmin Ouberri a proposé quelques règles d’or à ce sujet, comme la nécessité d’avoir une vue d’ensemble à tout moment. Un autre temps fort de la journée est l’atelier interactif et participatif « Comment promener son chien ? », proposé par les fondateurs du collectif Beyn , Nike Dieterich et Doha Elwazir. En débattant de ce sujet, et en apportant leurs propres compréhensions, les participants ont établi les valeurs clés de la collaboration et ont eu la chance de les incarner lors d’une courte session d’improvisation.

La deuxième journée débute par une visite locale à la communauté Habiba . Fondée en tant que petite entreprise familiale en 1994, Habiba devient une communauté exemplaire de praticiens engagés dans l’écotourisme, l’agriculture et la synergie des différences dans le sud du Sinaï. Guidés par le fondateur Maged El Said, les participants à l’académie ont acquis des connaissances en matière d’agriculture biologique, de développement communautaire et tout simplement de comportement humain dans les situations de chocs sociétaux, économiques et politiques que cette communauté a connus au fil des ans. « Toutes les solutions pour l’humanité proviennent de l’expérimentation. Tout ce qui se passe est une réponse à un défi », partage le fondateur.

Au cours de la seconde moitié de la deuxième journée, plusieurs sessions ont soulevé de nouvelles questions qui n’avaient toujours pas été abordées, donnant aux participants une précieuse occasion de prendre le temps de réfléchir. Les artistes Léon Dubois, Fethi Sahraoui et Abdallah Kassem ont invité les membres du groupe à méditer et à connaître leurs projets individuels, ou simplement à vivre une expérience artistique sur le sable de Nuweiba. Au moment du coucher du soleil, après que les informations du jour ont été recueillies, l’écran de cinéma s’est illuminé pour une projection de films soigneusement sélectionnés par Sarah Bahgat et Habiba Laoui.

Alors que l’Académie Écosystèmes touchait à sa fin, de nombreux sujets étaient toujours en suspens. Les animateurs de l’atelier ont invité les membres du groupe à se joindre à eux pour discuter du pouvoir de l’art dans les zones rurales, explorer les astuces de gestion stratégique, approfondir le concept des biens communs, et bien plus encore. Les praticiens travaillant dans les zones rurales de différents pays ont été accueillis par Hebah Omari, Mustafa Adnan Al-Sakran, Sandra Sleiman et Tareq Khalaf. Ils ont abordé l’énergie découlant de la solidarité et de la compréhension des facteurs communs quant à l’ouverture des espaces et de la gestion des activités dans des communautés souvent mal desservies. Une conversation stimulante, animée par Stephano Mendelek et Ahmed Borham sur les biens communs, a incité les participants

à s’interroger sur les possibilités futures de vivre et de travailler ensemble, en particulier dans des contextes urbains. De nombreuses autres conversations animées ont pris place au cours du déjeuner : une discussion sur l’avenir humain du travail avec le Dr Claudia Gross, le partage de souvenirs sur le Petit Prince avec Léon Duboison ou encore l’exploration des dernières tendances sur les réseaux sociaux. La question abordée le dernier jour est la suivante : « Et maintenant que faire ? » – que faire de tout ce qui a été appris, discuté et contesté au cours des jours précédents ? Pendant les dernières heures, chacun a réfléchi à l’intensité et à la densité des liens établis et des conversations qui se sont déroulées. Beaucoup ont mis en lumière l’importance de mettre en œuvre des changements structurels et de construire davantage de ponts entre les pays et les secteurs. Ils ont par ailleurs exprimé une volonté et une détermination communes à poursuivre les conversations et à agir en conséquence.

La deuxième édition de l’Académie Écosystèmes s’est clôturée sur une musique interprétée par un groupe de bédouins locaux. Les gens ont continué d’établir des liens et de partager leurs histoires dans l’air chaud de la nuit, des idées plein l’esprit et le cœur. Ce rassemblement témoigne de l’écosystème du programme All-Around Culture. Il prouve qu’en rassemblant les gens, nous favorisons l’art de la collaboration. L’écosystème de personnes travaillant dans les secteurs des arts, de la culture et de la société civile dans la région Mena ne se poursuivra pas indéfiniment. C’est pour cela que les connexions établies au cours de ces trois jours l’ont renforcé et ont donné un puissant élan aux collaborations futures et au transfert de connaissances dans cet environnement interconnecté.